Titre un peu tape à l’œil, je vous l’accorde. Disons, “moins besoin” alors. Mais d’où me vient-il, ce titre ? Et bien, une fois n’est pas coutume, ce billet parlera plus d’économie et d’écologie que d’informatique, mais bon, comme on parle quand même mieux de ce qu’on connaît, l’IT y aura aussi sa place, ne vous inquiétez pas. Ce titre donc, il vient d’une idée simple, et pourtant, dont on entend trop peu parler dans “notre société de croissance” : celle de la diminution du besoin.

Imaginez une situation dans laquelle on peut classer les éléments qui la constituent en deux catégories, la catégorie " bien" et la catégorie " pas bien" (oui, ça fait manichéen, mais ça existe). Le problème de tout un chacun dans cette situation est d’ augmenter la proportion de “bien” par rapport à celle de “pas bien”. C’est un peu abstrait ? Bon, allons-y plus concrètement. Prenons par exemple la production d’électricité en France. On peut classer les moyens de produire de l’électricité en deux catégories : ceux qui nous semblent bien (par exemple, les énergies renouvelables), et ceux qui nous semblent “pas bien” (par exemple, les énergies fossiles, ou le nucléaire). Notez bien sûr que chacun est libre de définir ses propres critères, cela ne change absolument rien au raisonnement. On peut classer une énergie dans “pas bien” parce qu’elle est polluante, dangereuse, ou tout simplement parce qu’on pense qu’elle n’existera plus dans 20 ans car il n’y aura plus de combustible. Peu importe la raison de notre classement, ce qui est important, c’est que tous les moyens de productions soient rangés dans l’une ou l’autre des catégories.

On s’en doutera, peu importe la situation, notre but, c’est de faire diminuer la part de “pas bien” par rapport à la part de “bien”. C’est un pourcentage relatif, donc, si on veut voir le pourcentage de “bien” augmenter, on a deux solutions : soit on augmente le nombre de “bien”, soit on diminue le nombre de “pas bien”, ce qui fait diminuer le total, et donc augmenter le pourcentage relatif de “bien”. Dans notre exemple, il s’agit donc de construire des centrales basées sur des énergies renouvelables, ou bien d’arrêter des centrales basées sur des énergies fossiles. Les deux solutions ont, statistiquement, exactement le même effet. En fait, si on veut voir un vrai gain, il faut essayer de faire les deux. Or, arrêter des centrales, c’est baisser les capacités de production. Cela exige donc de diminuer le besoin qui correspondait. D’où l’isolation des logements, la création d’appareils moins énergivores, etc.

Pour ces histoires d’énergies, à peu près tout le monde est d’accord, après tout, faire baisser la consommation ça fait baisser la facture, et on sait que les énergies “polluantes” ne seront pas disponibles à l’infinie. Le point que j’ai envie de soulever dans ce billet, c’est " pourquoi est-ce que l’on applique pas ce raisonnement à toutes les situations semblables ?"

Prenez une autre situation : le transport de personnes. On peut là aussi classer les moyens de transports dans deux catégories, “bien” (transport en communs, vélo, etc) et “pas bien” (voiture, avion…). Là encore, chacun est libre de choisir ses critères pour son classement. Pollution, stresse, accident, perte de temps… L’important, on l’a dit, c’est de tous les classer, pour ensuite faire augmenter la part des “bien” et diminuer celle des “pas bien”.

Et bien, étrangement, pour ce problème, je n’ai vu que la première approche (“augmenter les biens”) tenter de se mettre en place. Peut-être que je me trompe, mais je vois partout des gens faire ce qu’ils peuvent pour encourager le remplacement des “pas bien” par les “biens”, sans essayer de se demander si diminuer le besoin ne serait pas plus efficace, ou en tout cas, on l’a vu avec les énergies, autant nécessaire. C’est l’union des deux qui permet de progresser, pas un seul.

Donc, pourquoi est-ce qu’en plus de tenter de convaincre les gens de se déplacer en bus plutôt qu’en voiture, on ne se pose pas d’abord la question " est-ce qu’il a vraiment besoin d’aller là-bas ?". Vous vous en doutez certainement, cette question m’est venu un de ces soirs où, rentrant du travail, mon bus était une fois de plus coincé dans des bouchons qui m’ont fait perdre une heure de plus. J’en suis intimement convaincu, nos problèmes de pollutions, de stresse, de perte de temps et d’accident de la route pourraient être résolu beaucoup plus facilement si nous évitions tout simplement de nous déplacer plutôt que d’essayer de le faire “autrement”. Tout comme pour l’énergie, plus besoin d’essayer de la produire de manière propre si l’on s’en passe tout simplement.

Alors, oui, de nombreux métiers impliquent d’être sur place, oui, le lien social est important, mais sincèrement, je pense que le télétravail est la meilleure solution aux embouteillages, et je suis persuadé de ne pas être le seul à pouvoir faire exactement le même travail depuis chez moi qu’au bureau, gagnant ainsi au moins une heure et demi tous les jours (7h30 par semaine soit une journée entière de boulot supplémentaire !). À l’heure où nous pouvons communiquer instantanément avec n’importe quel endroit de la planète, où une très grosse part des échanges se font par e-mail / téléphone et non plus en direct ou par courrier, où nous n’avons en Europe quasiment plus que des bureaux et non plus des unités de production, est-il encore vraiment nécessaire de réunir des centaines de personnes au même endroit ?

Et ce raisonnement pour le travail est valable pour de nombreux autres déplacements : pourquoi aller se bousculer dans un supermarché lorsque l’on peut faire ses courses sur internet, puis les récupérer dans un point de dépôt à quelques pas de chez soi en centre ville ?

Enfin, je suis peut-être utopique, mais il est clair que je ne continuerai pas longtemps à perdre des dizaines d’heures par semaine dans les transports, ça m’est devenu carrément insupportable.